Protèger et punir au siècle des lumières

La lecture des multiples rapports de police relatifs à la vie quotidienne des Manceaux au XVIIIe siècle fait apparaître deux constantes : l’obligation de respecter scrupuleusement édits, ordonnances, arrêtés émanant de l’autorité royale relayée par le lieutenant général de police de la ville ; l’obligation de ne pas enfreindre les nombreux règlements censés maintenir l’ordre public et moral mais aussi de se conformer strictement aux interdits religieux qui encadrent la vie de la cité composée alors de seize paroisses. Au-dessus de ce complexe édifice administratif et juridique local, plane naturellement la volonté monarchique d’imposer à tous les sujets du roi un mode d’existence réglé sur le respect de la loi et de l’ordre établi. Sont évidemment proscrits troubles, émeutes larvées ou non, contestations salariales, manquements mineurs ou graves aux canons de la morale et de la religion. Trois strates majeures doivent alors être distinguées : la supériorité royale, la souveraineté royale, la notion d’absolutisme et de tyrannie.

Pour exercer son droit, le monarque doit respecter les formes légales sous-entendues par la constitution non écrite de la royauté. Dans l’exercice de la justice dont il est en théorie et en pratique le représentant suprême, le roi délègue ses pouvoirs à certains de ses sujets chargés par lui de rendre la justice en son nom, et de faire des règlements et des ordonnances pour l’exécution des lois. Ces pouvoirs sont entre les mains de corps d’officiers royaux – lieutenants de police, juges de police, procureurs du roi, huissiers de justice, greffiers – et de commissaires. Délégation, certes, mais non abandon des prérogatives royales puisque ces magistrats sont seulement des dispensateurs de la puissance conférée par le souverain. Officiers de justice et de police ne peuvent s’opposer aux commandements du monarque, même s’ils leur paraissent injustes. Ces personnages sont, tout autant que les autres, des sujets du roi. Les lois, quelle que soit leur nature, sont authentifiées par le sceau royal et les corps sociaux d’Ancien Régime, des plus humbles aux plus élevés, ne peuvent les remettre en question.